L'Étreinte du Crépuscule

 

Par une nuit glaciale de novembre, Paul le chasseur, arpentait les bois sombres de la forêt ardennaise. Habitué à traquer les sangliers dans cette région dense, il se vantait souvent de ses trophées, fièrement exposés dans son salon. Ce soir-là, la lune, voilée par des nuages ​​épais, jetait des ombres vacillantes sur le sol recouvert de feuilles mortes.

 

Paul suivait la piste d'un énorme sanglier qu'il avait repéré la veille. Un mâle massif, au pelage sombre comme le charbon et aux yeux rouges comme des braises.

 

Les anciens du village racontaient des histoires à propos de cet animal : le sanglier imposant était un esprit protecteur de la forêt, connu sous le nom de Cernunnos Noir. Il ne fallait pas l'approcher et dans aucun cas, s'attaquer à l'animal. Paul, en homme pragmatique, riait de ces légendes et voyait surtout une opportunité d'ajouter un trophée impressionnant à sa collection.

 

Avec son fusil chargé, il suit les traces fraîches laissées dans la boue. Il approchait du sanglier, il pouvait presque entendre son souffle dans les fourrés. Mais, soudain, tout est devenu silencieux. Pas un cri d'oiseau, pas le moindre bruissement de feuille. Juste un silence oppressant. Puis, un grondement aigre, guttural, s'élèva derrière lui.

 

Surpris, Paul se retourna. Là, à quelques mètres, se tenait un sanglier. Le chasseur reconnu immédiatement Cernunnos Noir. Les yeux rouges de la bête féroce transperçait l'obscurité, une intelligence perverse semblant y briller.

 

Avant que Paul ne puisse lever son arme, le sanglier chargea le chasseur. Le choc fût si brutal que Paul fût projeté au sol. Le chasseur voulut, dans un geste désespéré s'emparer de son fusil de chasse mais celui-ci était hors de sa portée.

 

Au lieu d'achever Paul, en état de choc et qui saignait abondamment, le sanglier s'arrêta à quelques mètres du chasseur, le fixant un long moment. Puis, Cernunnos Noir commença à gratter le sol avec ses puissantes pattes avant, comme s'il creusait. Paul, pétrifié de peur, observa avec horreur la scène. Le sanglier continuait avec acharnement à creuser une fosse dans le sol meuble.

 

Des heures semblaient s'écouler et Paul, incapable de bouger, sentait son esprit vaciller.  La mort du chasseur n'était plus loin.

 

Le sanglier, qui continuait à creuser le sol, n’était désormais plus seul. D'autres animaux de la fôret étaient apparus : des renards, des cerfs et même des corbeaux perchés sur les branches assistaient, en silence, à la scène.

 

Le trou étant assez profond, le sanglier s'approcha lentement de Paul. Avec une force inhumaine, l'animal poussa le corps affaibli du chasseur dans la fosse qu'il venait de creuser. Paul cria, supplia, mais le sanglier et les autres animaux de la forêt restaient de marbre.

 

Les animaux, silencieux, observaient  le sanglier qui recouvrait le corps du chasseur, méthodiquement, jusqu'à ce que Paul disparaisse entièrement sous le sol.

 

Le lendemain matin, les habitants du village trouvèrent le fusil de Paul et des traces de lutte. Mais le chasseur, lui, restait introuvable. Durant leur recherche, les amis de Paul ne remarquèrent pas un petit espace sur lequel un étrange buisson d'épines avait poussé en une nuit. La nature avait repris ses droits et  semblait veiller sur la tombe invisible du chasseur.

 

Depuis cette nuit funeste, les chasseurs locaux évitèrent cette partie de la forêt, murmurant que ceux qui osaient défier Cernunnos Noir disparaissaient à jamais, engloutis par la terre elle-même. Quant à Paul, certains disent que, les nuits de pleine lune, on peut entendre ses cris étouffés s'élever du sol, appelant à l'aide… en vain.